Mon premier balladeur

29 juin 2009

Aujourd’hui, on peut marcher dans la rue ou prendre les transports avec de la musique et même de la vidéo : Archos, Ipod, NokiaNséries et j’en passe. Mais rien ne remplacera mon premier « Walkman » !

Mon walkmanAnnée 1987, nous sommes en vacances au bled entre Marrakech et la plage d’Eljadida. Mon père invite deux de ses  potes de Saint Ouen à  passer leur congés au Maroc, Jean Luc D et Farid A. Farid est mon aîné de dix ans, et cela fait de lui un grand frère. T’inquiètes pas copain lecteur, rien à voir avec Pascal, le grand frère de Tf1. Non, Farid c’est le VRAI grand frère qui écoute de la funk, porte les dernières Nike et nous fait golri. Pendant son séjour, il a une machine avec un casque. Avec laquelle on peut écouter les cassettes audio. Cet objet m’interpelle, quand tu mets le casque sur tes oreilles, y a Thriller qui tourne ! Il l’a tout le temps avec lui, casque sur les oreilles posé sur les oreilles. Farid m’explique que c’est un walkman et que le nom veut dire en français – l’homme qui marche- Parce qu’on pouvait finalement marcher avec la musique, et gamin que je suis je me dis – Mais comment appelait-t-on alors celui qui ne marchait pas en écoutant de la musique ? (je sais copain lecteur c’est pourri mais c’est pour mettre du style) Comme Farid était un mec cool, il me prête son baladeur, quelques minutes c’est à dire le temps d’une chanson. J’écoute un peu, kiffe et lui rends. Le problème quand t’as deux frères, c’est qu’eux aussi veulent écouter. Farid en plus d’être plus cool avait du bon son, d’ailleurs mon père lui tapait ses cassettes : Delegation, Shalamar, Kool And The Gang, Michael Jackson, Imagination etc. Y a pas à dire Il était vraiment à la page. Après les vacances au Maroc, comme mon père les a bien accueilli, Farid lui avait offre son baladeur. C’était un Sanyo, de couleur bordeaux. Mon daron l’avait rangé dans une commode à la maison. Mais dès qu’il n’est pas là, j’en profite pour l’allumer à fond… A force de mettre le volume à toute patate, j’use les piles et forcément mon père grille que je l’utilise sans sa permission. C’est la grosse baffe à la Bud Spencer et le traditionnel « touche pas à mes affaires connard ! ». Mais c’était plus fort que moi et je recommençais. Et bien sûr je me remangeais la baffe ! C’était plus fort que moi Je kiffais trop son Walkman. En vrai avec le recul, c’est vrai qu’il était énorme le lecteur audi portable. L’équivalent d’un réfrigérateur ou d’une machine à laver. Non, mais c’était du lourd, fallait prévoir un sac à dos pour le porter. C’était marrant car son Walkman n’était pas « auto-reverse » mais avait une fonction exceptionnelle : on pouvait ralentir ou accélérer la vitesse de lecture. Il y avait aussi une fonction micro, qui me permettait de parler et de nous entendre sur la musique. Autant vous dire que je chantais sur du Kool and The Gang ou du Thriller. Sur le refrain de Kool And The Gang «Fresh », au lieu de chanter « she’s fresh, she’s so fresh », je balançais «Chizefunchchizesinflunch ». Je me prenais pour un chanteur, un peu comme le font les candidats d’émission de télé réalité devant des millions de téléspectateurs. Ridicule. J’aurais pu mettre ça sur le compte de la jeunesse mais j’avais déjà quatorze ans ! Ce qui était contraignant avec le baladeur, c’est que lorsque tu écoutais une chanson d’environ 3 à 4 minutes, il fallait rembobiner pendant 30 minutes pour la réécouter, c’était long. Comme mon père était très strict avec ses affaires, que j’en avais marre d’user ses piles et de me manger la baffe, je me suis débrouillé, j’ai eu par le biais de ma copine, Mimi des Francs Moisins, un Walkman. Je l’avais payé 100 francs. Une affaire. Mon premier. Il était bordeaux comme le Sanyo, les touches étaient grises et « auto-reverse » pour changer la face d’écoute sans sortir la cassette. C’était un Aïwa. Je marchais dans la rue avec mon casque et prenait les transports pour aller en cours. A l’intérieur j’ai écouté, réécouté, ré-réécouté… l’album de Michael Jackson « Bad ». A force je connaissais le tracklisting par coeur. J’allais au fond de la cour de récréation avec le son à fond et je regardais les autres, je clippais ça dans ma tête. A la maison, mes frères voulaient me l’emprunter, impossible de le lâcher. Par contre quand mon père le voulait, impossible de refuser. Sinon c’était la grosse baffe… Mon Walkman m’a lâché un an après mais je m’en fichais, j’avais découvert la technologie. Depuis j’ai fait toute ma scolarité avec une paire d’écouteurs et des baladeurs de plus en plus légers. L’inconvénient des baladeurs numériques, c’est qu’ils ne font pas office de machine de musculation, parce que tous les mecs de ma génération vous le diront, c’était (du) lourd, un Walkman !

Rachid Santaki